Recouvrement Agirc-Arrco: le Sénat prône de reporter à 2024 le transfert aux Urssaf

Publié le 23 juin 2022


La Mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale (Mecss) du Sénat a publié, le 22 juin, un rapport consacré à «l’unification du recouvrement social: un bilan contrasté, des perspectives à sécuriser».

«Les conditions de transfert du recouvrement des 83Mds€ de cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco en 2023 ne sont pas réunies», ont conclu les deux sénateurs rapporteurs, René-Paul Savary (LR, Marne) et Cathy Apourceau-Poly (GCR, Pas-de-Calais) en préconisant un moratoire du projet et son report en 2024.

Ce transfert s’inscrit dans le cadre de la centralisation au sein des Urssaf du recouvrement social initié par le gouvernement en 2018 dans la perspective de l’institution d’un système universel de retraite, aujourd’hui abandonné. Initialement prévu en 2022, le projet de transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco aux Urssaf avait été, une première fois reporté d’un au 1er janvier 2023, compte tenu du contexte marqué par la pandémie de Covid et la priorité accordée au soutien des entreprises en difficulté (lire KPS du 29 novembre 2021).

Pour justifier ce report, les sénateurs avancent plusieurs arguments :

  1. «En l’état le transfert présente plus d’inconvénients que d’avantages» et «les risques emportés par le transfert aux Urssaf de la fiabilisation des données DSN (pour l’affectation des droits individuels de retraite complémentaire, aujourd’hui réalisée par l’Agirc-Arrco), surpassent le bénéfice potentiel d’une amélioration du taux de recouvrement», souligne le rapport. Faute de «recul suffisant» concernant le contrôle au fil de l’eau des données DSN actuellement expérimenté dans 2 Urssaf régionales, l’Agirc-Arrco continuera de toute façon, au-delà du transfert, d’assurer cette fiabilisation à partir de son propre système d’informations. D’autant que 20% des salariés bénéficient d’un taux de cotisation supérieur au taux standard et 17% des entreprises appliquent une répartition (de cette contribution) plus favorable aux salariés».
  2. «Le développement par les Urssaf de capacités de fiabilisation des données individuelles constitue une charge importante pour les finances publiques».
  3. «Le transfert ne permet pas de générer des économies substantielles», poursuivent les 2 rapporteurs. Compte tenu du savoir-faire de l’Agirc-Arrco en matière de calcul des cotisations et de la méfiance réciproque entre les deux institutions, «une double interlocution doit impérativement subsister», soulignent-ils, avec pour, conséquence que «seuls 7,6 % des 2 534 salariés affectés au recouvrement et à la fiabilisation seraient transférés aux Urssaf, les autres devant être repositionnés en interne».
  4. Le transfert ne simplifiera pas considérablement les démarches des employeurs. Pire, «l’alignement des dates d’appel des cotisations sur celles des Urssaf (qui seraient alors anticipées de 10 à 20 jours» représenterait un impact de 6Mds€ sur la trésorerie des entreprises».
  5. «Les conditions d’extension des contrôles Urssaf aux cotisations Agirc-Arrco ne font pas consensus».
  6. «Au nom de la considération due au paritarisme, il serait inopportun de contraindre les partenaires sociaux à un transfert qui les inquiète légitimement et dont l’intérêt potentiel demeure limité», observe enfin le rapport de la Mecss.

Le moratoire d’un an doit permettre aux Urssaf de « progresser sur le plan de la fiabilisation des données individuelles», concluent les deux sénateurs qui préconisent également «une labellisation publique des logiciels de paie permettrait de garantir un niveau minimal de fiabilité de la déclaration à la source».