Réforme des retraites: le CSR se penche sur les effets escomptés

Publié le 21 juillet 2023


A l’occasion de la remise, le 13 juillet 2023, de son 10e avis, le Comité de suivi des retraites (CSR) revient sur les perspectives du système de retraite après la réforme d’avril 2013.

En 1993, un quasi-doublement de la population de retraités, comparé à la population en âge de travailler et de cotiser était attendu à l’horizon 2040, rappelle le CSR. A droits inchangés, il fallait en attendre une croissance de même ampleur de la part des dépenses dans le PIB. Pour y faire face, les réformes de 1993, 2003, 2010 et 2014 ont joué à la fois sur le taux d’effort des actifs (salariés et employeurs), le niveau relatif des pensions et l’âge de départ en retraite. Le recours combiné à ces 3 leviers avait vocation à stabiliser les dépenses 2 à 3 points de PIB au-dessus de leur niveau initial de 11% (en 1993), en contrepartie d’un âge moyen de départ à la retraite porté à terme à un âge compris entre 64 et 65 ans et un niveau de vie des retraités en repli de 15 à 20 points en dessous de la quasi-parité à laquelle la montée en puissance du système avait conduit.

En réalité, la mobilisation de ces 3 leviers s’est faite de façon inégale et tardive : la remontée de l’âge de liquidation n’a réellement commencé qu’à la fin des années 2000. Le décrochement du niveau de vie relatif des retraités est encore à venir et son ampleur, incertaine, dépend fortement des hypothèses de croissance. Si bien que dès le tournant des années 2010, avec 30 ans d’avance sur le calendrier initialement prévu, les dépenses de retraites représentaient entre 13 et 14% du PIB. Pour financer ce surcroît anticipé de dépenses, les financements alternatifs (transferts en provenance d’autres branches de la Sécurité sociale, impôts et taxes affectées, subventions d’équilibre aux régimes spéciaux) se sont multipliés mobilisant des ressources qui auraient pu être affectés à d’autres usages. Cela a entraîné un débat récurrent sur la soutenabilité des déficits d’une part, et sur les avantages présumés des régimes spéciaux subventionnés.

Dans le contexte actuel de tension globale sur les déficits publics, l’adoption de la réforme d’avril 2023 ne devrait pas foncièrement changer la donne, estime le CSR. A court terme, le surcroît de hausse de l’âge effectif de départ sera bien plus faible que les 2 années de décalage d’ouverture des droits qu’elle recouvre, affirme le CSR. Car même sans réforme, un certain nombre d’individus devaient déjà liquider leurs droits après 62 ans. De plus, l’impact de ce décalage a été minoré par diverses mesures au bénéfice des plus fragiles (invalides et inaptes, carrières courtes). Cette réforme n’aura pas non plus de gain à plus long terme dans la mesure où le décalage des âges de départ est amoindri par la hausse des niveaux de pension qu’elle engendre d’une part et par les mesures nouvelles de soutien aux petites retraites d’autre part. Au final, conclut le CSR, la réforme apparaît financièrement moins efficace et plus redistributive, au risque de voir subsister ou réapparaître des déficits.

Dans ce contexte, le CSR estime que :

  • Toucher encore davantage aux critères d’âge semble de plus en plus difficile compte tenu de l’impact de cette mesure sur la durée de retraite en recul depuis son point haut d’avant la réforme de 2010 ;
  • La question d’une hausse des cotisations n’est pas à écarter d’office, sachant que le taux global de 28% (fixé par la loi de 2014) doit s’apprécier tentant compte du prélèvement global régimes complémentaires inclus et de l’impact de la réforme sur l’équilibre financier de ces derniers.
  • Le levier de la baisse relative des pensions pourrait être davantage mobilisé à court terme.

La mobilisation de ces mécanismes d’équilibrage ne peut toutefois s’inscrire que dans le cadre d’une stratégie d’ensemble intégrant :

  • Des règles d’évolution prenant en compte les évolutions constatées d’espérance de vie ;
  • Des règles de revalorisation des salaires portés aux comptes, des pensions en cours de service ou de valeur des points moins dépendantes de la croissance et intégrant la nécessité de garantir l’équilibre financier du système.
  • La poursuite de l’harmonisation progressive des droits.