Médicaments: la mission Borne propose un New Deal pour maîtriser les dépenses

Publié le 30 août 2023


La mission, mandatée en janvier 2023 par la Première ministre, Elisabeth Borne, en vue de revoir une politique de régulation du prix des médicaments à bout de souffle, a rendu, le 29 août 2023, son rapport. Certaines de ses préconisations seront reprises dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui sera présenté fin septembre.

Dans un contexte de progression très dynamique des dépenses de médicament, portée par les progrès thérapeutiques, le vieillissement de la population, d’une part, et des facteurs plus conjoncturels (crise du Covid, difficultés d’approvisionnement, contexte géopolitique instable, inflation), «l’accès durable aux traitements innovants comme matures n’est plus assuré aujourd’hui», reconnaissait, en janvier, la Première Ministre. De leur côté, les mécanismes de maîtrise des dépenses existants ne sont plus aussi efficaces que par le passé, comme le montre l’emballement des dépenses observé depuis 2021 : «Après une période d’évolution inférieure à l’ONDAM, les dépenses consacrées aux médicaments (27,8Mds€ en 2022) et aux dispositifs médicaux (10,3Mds€) ont respectivement augmenté de 8,8% et de 12,3% entre 2020 et 2022, soit à un rythme largement supérieur à celui de l’Ondam exécuté. Quant à l’évolution du chiffre d’affaires net de remises (26,4Mds€ en 2022), en hausse globale de 5% en un an, mais de +7,5% sur les seuls médicaments distribués en ville, il a «plus que doublé» par rapport à la trajectoire initiale. Pour mémoire, en 2021, l’assurance maladie a financé 75% des dépenses totales des médicaments (soit 23,3Mds€ sur 31,1Mds€), les assureurs complémentaires 11,4% (3,5Mds€) de façon à laisser à la charge des ménages 4,1Mds€ (soit 13,3% de la dépense).  

Dans ce contexte difficile, la mission propose de bâtir un véritable «New Deal» garantissant un accès égal et durable des patients à tous les produits de santé. Pour ce faire, la mission préconise de «mobiliser tous les leviers de baisses de volume, y compris la prévention, et d’amélioration des parcours de soins», en complément de mécanismes révisés de baisses de prix et de fixation de la clause de sauvegarde imposée en cas de dépassement des volumes.

  • Vis-à-vis des patients : la mission propose d’organiser une campagne de sensibilisation sur le thème de la «sobriété médicaments» en rappelant les enjeux essentiels liés à la prescription et à l’usage des médicaments, en commençant par rappeler les mesures d’hygiène et d’incitation au port du masque dans les lieux de forte affluence dès la rentrée de septembre 2023.
  • Vis-à-des médecins prescripteurs (sachant qu’en moyenne un médecin prescrit environ 730000€ de dépenses par an dont 30% de médicaments) en accélérant le déploiement d’outils d’accompagnement de la prescription (aide à la dispensation, suivi des recommandations sanitaires), via un recours accru aux tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) favorisant une utilisation raisonnée des antibiotiques, sachant que seuls 2 des 6 millions des prescriptions d’antibiotiques seraient justifiées. La mission propose aussi d’étendre les missions des pharmaciens pour les autoriser à prescrire et délivrer certains médicaments permettant de traiter la cystite aigüe simple et les angines bactériennes après un test positif. Le rôle de prévention de ces derniers pourrait être aussi renforcé en leur réallouant une partie des marges réalisées sur les ventes de générique.

Pour retrouver des marges financières, la mission suggère aussi de:

  • Développer activement l’usage des médicaments génériques et biosimilaires ;
  • De revoir la chaîne de distribution des médicaments particulièrement élevée et peu optimisée en ville ;
  • Professionnaliser les achats de produits de santé (19,8Mds€ en 2022) dans les hôpitaux publics ;
  • Prendre en compte les enjeux environnementaux dans la régulation et de favoriser la réutilisation des dispositifs médicaux
  • Améliorer le processus de prise en charge des dispositifs médicaux innovants.

De son côté, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a indiqué, le 27 août 2023 sur LCI, avoir «proposé aux industriels d’augmenter de 10ù le prix de certains médicaments remboursés (sur lesquels il y a la plus forte pénurie) en échange d’une garantie de livraison à la France de suffisamment de volumes».