Pacte de la vie au travail: échec des négociations

Publié le 11 avril 2024


En dépit de 5 mois de travail, 15 séances de discussions et un dernier round de négociations qui s’est achevé dans la nuit du 9 au 10 avril 2024, aucun syndicat ne devrait finalement ratifier le projet d’ANI en faveur de l’anticipation et de l’accompagnement des transformations du travail et de l’emploi.

Cette négociation a porté sur les 3 sujets censurés ou laissés de côté lors de l’adoption définitive de la réforme des retraites d’avril 2023 : l’emploi des seniors, la création d’un compte épargne temps universel (CETU) et la lutte contre l’usure professionnelle (lire KPS du  26 décembre 2023).

L’ensemble des organisations syndicales ont pointé le manque d’ambition et «l’absence de droits nouveaux pour les salariés» de l’ultime texte patronal découpé en «4 grandes priorités» :

  • Accompagner les parcours professionnels des salariés tout au long de leur carrière afin de mieux anticiper les évolutions des emplois, des compétences et des qualifications ;
  • Renforcer la prévention de l’usure et de la désinsertion professionnelles tout au long de la carrière dans un objectif de maintien dans l’emploi et de qualité des parcours professionnels ;
  • Mettre en œuvre des mesures ciblées pour accompagner et sécuriser les salariés expérimentés dans l’objectif d’améliorer le taux d’emploi et le maintien en emploi des seniors ;
  • Elaborer et piloter une stratégie nationale relative à la mise en œuvre des mesures de l’accord.

Concernant l’accompagnement des parcours professionnels des salariés tout au long de leur carrière, le projet d’ANI prévoyait notamment la mise en place de parcours de reconversion à l’initiative du salarié assimilé à une démission, un point fortement contesté par les organisations syndicales. Il reprenait aussi l’idée d’un rendez-vous-en 2e partie de carrière en lien avec la visite médicale de mi-carrière organisée dans l’année du 45e anniversaire du salarié.  Le texte prévoyait aussi des entretiens de bilan et de perspectives professionnelles tous les 4 ans à partir du 35e anniversaire du salarié. La copie patronale encourageait aussi le salarié âgé de 60 ans à communiquer à son employeur sa date d’atteinte d’une retraite à taux plein. Elle prévoyait aussi, par accord de branche ou d’entreprise, le déploiement de temps partiel de fin de carrière, financièrement compensé par l’indemnité de départ en retraite qui aurait été dû au salarié.

En matière de lutte contre l’usure professionnelle, le texte invitait les branches professionnelles ayant mis en place un fonds de solidarité , notamment celles avec un fort taux de sinistralité, à proposer aux entreprises des actions ciblées et adaptées en matière de prévention, telles que la mise en place de rendez-vous santé à partir d’un certain âge à destination des salariés exposés à des risques professionnels donnés ou des formations en entreprise sur la prévention de l’usure professionnelle.

S’agissant du maintien dans l’emploi des seniors, le texte obligeait les branches professionnelles à engager, au moins une fois tous les 4 ans, une négociation sur l’emploi des seniors. Le texte prévoyait surtout la création, à titre expérimental d’un contrat de valorisation de l’expérience destiné aux demandeurs d’emploi de 60 ans et plus susceptible d’être rompu à l’initiative de l’employeur dès l’atteinte de l’âge légal de départ et de l’âge d’atteinte d’une retraite à taux plein dans le cadre d’une mise à la retraite anticipée.

Si le projet d’ANI proposait de renforcer l’attractivité de la retraite progressive, le patronat s’est toujours refusé à en faire un droit opposable aux employeurs, comme le réclamaient les organisations syndicales.

Enfin, l’absence de signature syndicale rend caduques les dispositions du projet d’ANI renvoyant à la négociation d’un avenant sur façon d’économiser 440M€ sur l’indemnisation des seniors demandeurs d’emploi sur la période 2024-2027 comme le prévoyait l’ANI du 10 novembre 2023 (lire KPS du 15 décembre 2023). Pour mémoire, le ministre du Travail de l’époque, Olivier Dussopt, avait indiqué que cet ANI ne serait de toute façon pas agréé tant que de telles mesures ne seraient pas détaillées par les partenaires sociaux.