Les pistes des Hauts Conseils pour redresser les comptes de l’Assurance maladie

Publié le 04 juillet 2025


Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) et le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) ont remis, le 3 juillet 2025, leur rapport détaillant leurs propositions «pour un redressement durable de la Sécurité sociale», en réponse à la saisine du Premier Ministre, François Bayrou adressée en mars (lire KPS du 6 mars 2025). L’un des chapitres destinés à rétablir les comptes de l’assurance maladie, est consacré à l’articulation entre l’assurance maladie obligatoire (AMO) et les assurances maladies complémentaires (AMC).

Ce rapport présente l’intérêt de tordre une idée reçue concernant l’impact des mesures de transfert de l’AMO vers l’AMC à travers des mesures de hausses de ticket modérateur, à l’instar de celles mises en œuvre pour les soins dentaires en 2023. Loin de réduire la dépense de santé, ces mesures de transfert se répercutent à hauteur d’au moins 90% sur les dépenses de prestations des AMC et donc à hauteur de 103% dans les cotisations d’AMC en tenant compte de la fiscalité applicable aux AMC (TSA et forfait médecin traitant). Autrement dit, ces transferts ont un effet économique comparable à celui d’une hausse de prélèvements obligatoires, concluent les rapporteurs. Ils ont, en outre, tendance à peser davantage sur les ménages modestes et les personnes âgées.



Pour maĂ®triser les dĂ©penses de santĂ©, il convient donc plutĂ´t d’agir conjointement sur les prises en charge de l’AMO et des complĂ©mentaires en jouant sur les paniers de prestations, qu’il s’agisse du panier de soins essentiels dĂ©diĂ©s aux bĂ©nĂ©ficiaires de la complĂ©mentaire santĂ© solidaire (C2S) ou du panier du contrat solidaire et responsable. De ce point de vue, les rapporteurs prĂ©conisent :

  • D’obliger chaque AMC Ă  proposer un contrat limitĂ© au panier de soins essentiels ;
  • De rééxaminer la liste des produits et prestations remboursĂ©s en commençant par supprimer la prise en charge des cures thermales et de rĂ©duire de 15 Ă  5% celle des mĂ©dicaments en raison de leur service mĂ©dical faible ou non dĂ©montrĂ©.
  • D’exclure du champ du contrat responsable les soins non conventionnels dont la valeur ajoutĂ©e thĂ©rapeutique n’est pas dĂ©montrĂ©e (tels que l’ostĂ©opathie) et les prestations connexes Ă  la santĂ© (tels que la chambre particulière Ă  l’hĂ´pital) ;
  • De modĂ©rer les prises en charge des paniers 100% SantĂ© en :
    • allongeant de 2 Ă  3 voire 5 ans le dĂ©lai de renouvellement des Ă©quipements optiques ;
    • ajustant la tarification et en interdisant la publicitĂ© de l’ensemble des dispositifs mĂ©dicaux ;
    • mettant en place un panier Ă  tarif modĂ©rĂ© pour les audioprothèses ;
    • rĂ©duisant la prise en charge des paniers Ă  tarifs libres par l’AMC via la fixation de plafonds de prise en charge, la suppression de l’obligation de prise en charge du ticket modĂ©rateur sur les paniers Ă  prix libres voire la sortie des paniers Ă  prix tarifs libres du champ du contrat responsable.

Pour autant, toutes ces mesures ne permettront pas de rĂ©pondre aux principales causes du dĂ©sĂ©quilibre budgĂ©taire de l’assurance maladie et qui tiennent Ă  la part croissante de prise en charge des patients en affection de longue durĂ©e (ALD). Cette Ă©volution dĂ©mographique structurelle amènerait Ă  rĂ©interroger l’articulation entre l’AMO et l’AMC, en vertu de scĂ©narios dĂ©jĂ  explorĂ©s par le HCAAM par le passĂ© mais non soutenus par ses membres, tels que l’instauration d’une Grande SĂ©cu, d’un bouclier sanitaire, d’une assurance complĂ©mentaire obligatoire universelle mutualisĂ©e ou d’un dĂ©croisement entre les domaines d’intervention de l’AMO et de l’AMC  (lire KPS du 17 janvier 2022). De mĂŞme, le rapport rappelle aussi les pistes d’économies possibles sur le dispositif ALD recensĂ©es par le rapport de l’IGAS-IGF publiĂ© en septembre 2024 (lire KPS du 9 septembre 2024).

En conclusion, le rapport rappelle surtout l’ampleur du dĂ©fi budgĂ©taire Ă  relever, sachant que les propositions volontaristes de la Cour des comptes dans sa note d’avril (lire KPS du 14 avril 2025), ne reprĂ©sentent «qu’un peu moins de l’effort nĂ©cessaire pour ramener l’assurance maladie Ă  l’équilibre Ă  l’horizon 2029». Partant de lĂ , le reste de l’effort devra ĂŞtre rĂ©alisĂ©, prĂ©cisent les rapporteurs :

  • soit par des mesures de pĂ©rimètre d’une telle ampleur qu’elles constitueraient une vĂ©ritable remise en cause de notre système de prise en charge de santĂ©, et mĂŞme de sa rĂ©gulation, sans accroĂ®tre en rien son efficience ;
  • soit par un relèvement des ressources allouĂ©es Ă  l’assurance-maladie, comme cela a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© au cours de la dĂ©cennie 2010.