Partage de la valeur ajoutée: l’avis des députés sur l’ANI

Publié le 12 avril 2023


La mission d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise a présenté, le 12 avril 2023, son rapport à la commission des Finances de l’Assemblée nationale.

Concernant l’ANI du 10 février 2023 sur le partage de la valeur ajoutée signé par les partenaires sociaux (lire KPS du 28 février 2023), la mission pilotée par les députés Louis Margueritte (Renaissance) et Eva Sas (Ecologiste – NUPES), salue «l’obligation faite aux entreprises de 11 à 50 salariés d’instituer un dispositif de partage de la valeur (article 7 de l’ANI) et propose d’en anticiper la mise en œuvre au 1er janvier 2024 (au lieu du 1er janvier 2025). Le nombre de bénéficiaires serait toutefois limité : «Un maximum de 16750 entreprises représentant entre 180000 et 840000 pourraient être concernés sur 130000», selon les premières estimations de la DARES.

Concernant l’obligation d’ouvrir une négociation de branche d’ici le 30 juin 2024 visant à mettre à disposition des entreprises de moins de 50 salariés un dispositif de participation facultatif (article 6 de l’ANI), les députés plaident en faveur d’un «suivi vigilant sur le nombre d’accords négociés dans ce cadre, vu les effets mitigés des précédentes obligations à négocier».

Les députés soutiennent aussi la proposition de l’ANI d’assouplir le seuil de 50 salariés pour l’obligation d’instituer un dispositif de participation (article 8) et d’apprécier ce seuil en moyenne sur les 5 dernières années.  Ils défendent également un certain nombre d’évolutions bienvenues et de recommandations louables de l’ANI. Les députés proposent enfin d’ouvrir une possibilité de déblocage de leur plan d’épargne supplémentaire pour les salariés au revenu fiscal de référence inférieur à 3 SMIC et ce, dans un plafond de 1000€ par an dans des conditions simplifiées.  

Auparavant, la mission a établi un état des lieux des dispositifs existants destinés à associer les salariés aux performances économiques de leur entreprise : intéressement, participation, prime de partage de la valeur ajoutée, actionnariat salarié et épargne salariale. Pour mémoire, 53% des salariés du secteur privé non agricole, soit 9,5 millions de personnes, étaient, en 2020,  couverts par au moins un dispositif de partage de la valeur et 17,5Mds€ avaient été distribués dans ce cadre, selon le dernier bilan annuel de la Dares (lire KPS du 22 mai 2022). «L’accès des salariés à ces dispositifs reste néanmoins «très inégalement réparti selon la nature et la taille de l’entreprise», observent les 2 rapporteurs.

La participation apparaît en stagnation voire en déclin depuis 2006, que ce soit en montant total brut distribué (lequel s’est limité en 2019 à 1,61% de la masse salariale totale contre 2,06% en en 2006) ou de bénéficiaires concernés (36,3% en 2019 contre 40,6% en 2006). Un déclin à mettre en relation, selon les rapporteurs, avec le mode de calcul du seuil de 50 salariés au-delà duquel la participation devient obligatoire. A contrario, l’intéressement a bénéficié depuis 2017, d’un ensemble de mesures d’assouplissement permettant d’accroître la part de bénéficiaires concernés et les volumes distribués. En parallèle, le succès de la prime de partage de la valeur (PPV) qui a pris le relai en 2022 de la PEPA, est indéniable: «Entre 2019 et mars 2022, 8,3Mds€ ont ainsi été versés par 1,6 million d’établissements à 15,3 millions de salariés pour un montant moyen de 542€», selon la DG Trésor. Mais avec des effets d’aubaine avérés - «Sur 100€ de PEPA, entre 15 et 40€ auraient été accordés en augmentations de salaire si cette prime n’avait pas existé, selon l’INSEE – et un « risque de concurrence avec les autres dispositifs de partage de la valeur ajoutée», déplorent les rapporteurs.

D’une façon générale, «ces dispositifs ont un coût non négligeable pour le financement de la Sécurité sociale» soulignent les rapporteurs. La perte totale de cotisations qui résulte des exemptions d’assiette et des dispositifs d’exonération de droit commun s’établit ainsi à près de 1,7Md€ en 2021, après application des dispositifs généraux d’allègements.